02 mai 2023

Observatoire – Retour sur le module #3 du Programme 3D : « Accès aux soins et barrière linguistique – soigner avec les bons mots »

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Le troisième module du Programme 3D « Dialogues, Droits et Diversité », intitulé « Accès aux soins et barrière linguistique – soigner avec les bons mots » s’est tenu les 19 et 20 janvier 2023 et a rassemblé plus de 50 participantes et participants aux parcours divers : professionnels du secteur social, professionnels de santé, interprètes professionnels, agents des services publics, bénévoles, professeurs et étudiants qui ont échangé sur les obstacles dans l’accès à la santé des personnes migrantes en France.

Au-delà des procédures de demande d’asile, le parcours migratoire est un parcours complexe pour accéder au droit à la santé, à une prise en charge médicale ou psychologique adaptée. Ainsi, exil et santé sont indissociablement liés et culturellement conditionnés.

Les interventions

Le 19 janvier, nous avons pu échanger avec Stéphanie Larchanché, anthropologue médicale, chargée d’enseignement et administratrice d’ISM Interprétariat et Ghada Hatem-Gantzer, gynécologue obstétricienne, fondatrice et médecin cheffe de la Maison des femmes de Saint-Denis.

Madame Larchanché a abordé les questions de l’interprétation et la médiation dans l’accès aux soins. Avec elle, nous avons pu explorer la maladie comme expérience totale, porteuse de sens divers et décrire les obstacles culturels et linguistiques qui apparaissent lors de la rencontre entre un soignant et un soigné. Nous avons également décrit les nombreuses résistances culturelles, institutionnelles au recours à l’interprétariat en France et, parallèlement, la prise de conscience sur son importance dans le soin. Nous avons alors évoqué la notion de compétence culturelle, entendue comme une nouvelle manière d’appréhender le rapport à l’autre. Enfin, nous avons parlé de médiation transculturelle.

L’après-midi s’est poursuivi avec l’intervention de Madame Hatem-Gantzer qui a abordé les spécificités de la santé et l’accès aux soins des femmes migrantes victimes de violences. Elle a d’abord défini la notion de continuum de violences, subi par les patientes accompagnées à la Maison des femmes et la nécessité d’un parcours alliant santé physique et mentale, suivi juridique et ateliers d’entraide et d’échange entre femmes. Elle a également évoqué l’importance de l’interprétariat dans leurs consultations afin de contribuer, notamment, à l’autonomisation des femmes suivies.

La deuxième journée a débuté avec la rencontre d’un acteur de la santé mentale des personnes migrantes, l’Orspere-Samdarra, observatoire national explorant les liens entre santé mentale et vulnérabilités sociales. Morgan Fahmi, psychiatre, intervenant dans le cadre du pôle recherche, des formations et des permanences au sein de l’Orspere-Samdarra ainsi qu’au sein du Centre hospitalier Le Vinatier, et Ada-Luz Duque, chargée de mission au sein de cet observatoire et interprète en espagnol et portugais, ont alors évoqué les diverses vulnérabilités des personnes migrantes et les facteurs de risque de développement de maladies qui interviennent avant, pendant mais également après le parcours migratoire et qui sont liés aux conditions d’accueil. Madame Duque a alors évoqué le rôle de l’interprète comme acteur du soin et son adaptabilité à diverses postures et contextes. Elle a également détaillé les apports de la médiation dans l’accueil des personnes migrantes allophones.

Enfin, le module s’est achevé avec les interventions de Anne Delizée, chargée de cours à la Faculté de Traduction et d’Interprétation et Responsable des programmes en interprétation de dialogue à l’Université de Mons et d’Olivier Lefebvre, médecin, coordinateur national du pôle médical du Comede, Comité pour la santé des exilés.

Madame Delizée a précisé les collaborations possibles entre interprètes et thérapeutes en santé mentale et détaillé la large palette de compétences de l’interprète professionnel chez qui la maîtrise de la langue et des outils de l’interprétariat n’est qu’un socle sur lequel se construit un continuum des positions activables. Ainsi, l’interprète, lorsqu’il est impliqué par le thérapeute, peut activer le lien social avec le patient et avoir des effets thérapeutiques.

Enfin, Monsieur Lefebvre a détaillé la situation de santé et l’accès aux soins des personnes migrantes, tous deux dégradés selon les observations du Comede. Nous avons alors pu connaître les groupes les plus vulnérables et les obstacles et discriminations, grandissants, dans les parcours de soins.

Ainsi, ces deux journées nous ont permis d’acquérir une vue d’ensemble sur l’accès aux soins des personnes exilées et le rôle de l’interprétariat et la médiation dans l’accès à ce droit fondamental qu’est la santé. Nous avons également pu approfondir sur la situation spécifique des femmes migrantes victimes de violences et la santé mentale des personnes migrantes.