07 septembre 2023

Dans la presse – « Se faire soigner quand on ne parle pas la langue du pays » : intervention à Radio France Internationale (RFI)

« Se faire soigner quand on ne parle pas la langue du pays » - Intervention à Radio France Internationale

Afin de sensibiliser à l’importance du recours à linterprétariat en santé, Aziz TABOURI, Directeur général d’ISM Interprétariat, était l’un des invités de l’émission Priorité Santé de Radio France Internationale (RFI). Aux côtés de Mamadou BA, interprète à ISM Interprétariat, et Ghada HATEM-GANTZER, gynécologue, obstétricienne et fondatrice de la Maison des femmes à Saint-Denis, les échanges ont fait la lumière sur les besoins de lever la barrière de la langue pour les patients qui ne parlent pas français.

L’importance du recours à l’interprétariat en santé

Lever la barrière de la langue est un double défi : à la fois pour le soignant et pour le patient. Le recours à l’interprétariat permet la compréhension et la confiance entre les deux parties.

L’interprétariat en santé a été créé dans les années 1970 par l’association ISM Interprétariat, et il fallait alors tout inventer. Au fur et à mesure des années, grâce à la sensibilisation, l’interprétariat en santé a été reconnu avec par exemple l’organisation d’un colloque national en 2010 et l’adoption d’un référentiel par la Haute Autorité de Santé en 2017 qui fixe le cadre du métier.

Cependant, Aziz TABOURI explique qu’aujourd’hui « le plus grand concurrent à l’interprétariat en santé, c’est l’indifférence ». De nombreux soignants ne le connaissent pas et certains, même s’ils en ont connaissance, font le choix de ne pas y avoir recours. C’est pourquoi il est essentiel de convaincre quant à son importance.

Le métier d’interprète en santé : un métier au-delà des mots

Mamadou BA est interprète à ISM Interprétariat et pour lui « il ne suffit pas de parler une langue pour être interprète ». L’interprète doit respecter des règles déontologiques, avoir des connaissances culturelles et des compétences de médiation. Aziz TABOURI confirme qu’être interprète « c’est un métier fait de nuances » et qu’ « on ne devient pas interprète du jour au lendemain ».

Dans le domaine de la santé, Mamadou BA reconnait que « la présence de l’interprète rassure le patient. Un logiciel ne peut pas mesurer les émotions ». L’interprète est essentiel pour permettre une alliance entre le patient et le soignant. Il revient à l’interprète de travailler sur ses techniques, Mamadou BA travaille lui en particulier sur les symptômes, afin de permettre une meilleure compréhension.

Certaines consultations sont difficiles à vivre pour les interprètes, comme les annonces de maladies graves, surtout quand elles touchent des enfants. Il faut être capable de choisir les bons mots. ISM Interprétariat attache une importance particulière à l’accompagnement et à la formation de ses interprètes, tant sur le métier en lui-même que sur les thématiques de leurs interventions et sur le décentrage.

Lever la barrière de la langue pour les femmes vulnérables

Pour Ghada HATEM-GANTZER, « le recours à l’interprétariat est une préoccupation pluriquotidienne car les patientes viennent de partout à travers le monde ». La Maison des femmes de Saint-Denis prend en charge des patientes d’environ 110 à 120 nationalités différentes, avec autant de langues et de dialectes. Il faut pouvoir parler avec la patiente pour avoir une compréhension fine de ses symptômes, et c’est d’autant plus important pour comprendre les troubles psychologiques.

La Maison des femmes de Saint-Denis a donc recours à des interprètes en présentiel et par téléphone. Les professionnels de la structure évitent le recours à un membre de la famille, car en fonction des communautés et de sujets dérangeants abordés, il y a un risque de ne pas avoir la traduction de toutes les informations.

Même s’il existe une certaine reconnaissance conceptuelle du recours à l’interprétariat, à la fois par les professionnels de santé et par les autorités, Ghada HATEM-GANTZER explique que les soignants, contraints par le temps, par une grande charge de travail, par des urgences, peuvent avoir la tentation de se passer de l’interprétariat.

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