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Témoignages – Le recours à l’interprétariat professionnel : un maillon de proximité au service des collectivités

Il y a quelques jours, s’est tenu le Salon des Maires et des Collectivités Locales, un événement unique rassemblant des milliers d’acteurs territoriaux, institutionnels, associatifs, afin de partager leurs projets et expériences.
A cette occasion, ISM Interprétariat a souhaité donner la parole à des professionnels de collectivités pour mettre en lumière l’importance du recours à l’interprétariat professionnel, en tant qu’outil au service de l’accès aux droits des personnes migrantes non francophones et de la réalisation des missions du service public.
Dans l’accueil et l’accompagnement des personnes ne maitrisant pas ou peu le français, les professionnels des services publics se retrouvent souvent démunis : dispositifs saturés, moyens humains et financiers limités, complexités administratives dépendant des différents statuts des personnes étrangères, absence de moyens consacrés à la compréhension linguistique avec les personnes accueillies, qu’il s’agisse de la traduction dans différentes langues des informations, dossiers, des procédures, ou de l’interprétariat des échanges.
Sur le terrain, des solutions bricolées s’échafaudent, mais elles ne sont ni satisfaisantes pour les personnes non francophones, ni pour les agents publics. Le recours à l’interprétariat apparait alors comme un levier permettant à la fois, dans des situations concrètes, de faciliter la compréhension entre deux personnes de langues et de cultures différentes, et de participer à la construction plus générale d’un accueil égalitaire pour toutes les personnes, valeur fondamentale du service public en France.
L’action sociale assurée par les conseils départementaux et les structures qui leurs sont rattachées inscrit leurs professionnels au cœur de l’accompagnement de différents publics, parfois non francophones.
Carinne GOMIS, puéricultrice et responsable de circonscription PMI (Protection Maternelle et Infantile) de Pantin dans le Département de la Seine-Saint-Denis, témoigne de l’importance de recourir à des interprètes professionnels dans l’accompagnement des familles allophones accueillies au sein des centres de PMI. Ces centres assurent un accueil inconditionnel, en accompagnant les femmes et leurs enfants de 0 à 6 ans, en termes de prévention, de santé de l’enfant, de santé sexuelle et reproductive, de suivi de grossesse, de santé maternelle et de soutien à la parentalité.
Comment et pourquoi avez-vous pris la décision de faire appel à des interprètes professionnels dans l’accompagnement que vous assurez en centre de PMI ?
Pour assurer un suivi de santé de qualité des patientes allophones, on ne peut pas se contenter d’approximations. Google Traduction ne permet pas une compréhension fiable et précise, c’est une traduction qui n’est ni sincère ni authentique. La prévention en santé nécessite de la précision, qui est possible uniquement avec la présence d’interprètes.
Selon vous, quels sont les apports d’un interprète professionnel pour l’accompagnement médical des familles se rendant en centre de PMI ? D’un côté pour vous en tant que professionnel et d’un autre côté pour les familles allophones ?
Le recours à l’interprétariat peut faire peur, car on peut supposer que cela prend du temps et qu’une tierce personne s’immisce dans la relation entre le soignant et le patient. Cependant, pour le professionnel de santé, s’il n’y a pas d’interprète, les informations échangées ne sont que factuelles et superficielles, et on ne peut pas aller plus loin. Pour les familles accompagnées, sans interprète, elles ne peuvent pas exprimer ce qu’elles vivent, exprimer les réalités de leurs situations. Il ne faut pas oublier que les personnes allophones sont des usagers qui ont les mêmes droits que tous les autres usagers.
J’ai en tête un exemple d’une situation qui m’émeut encore aujourd’hui : j’avais effectué une visite à domicile auprès d’une famille originaire d’Afrique de l’Est et qui ne parlait pas un mot de français. Cette famille avait traversé la Libye et ensuite la Méditerranée sur un bateau de fortune. Quand je leur ai rendu visite à Bobigny, j’étais accompagnée d’un interprète professionnel. Chez la famille, la télé était allumée et des images de la mer étaient en train de passer. Le père de famille a alors expliqué à l’interprète qu’en voyant ces images, il ressentait de l’anxiété, que durant la traversée son enfant était tombé du bateau et qu’il l’avait secouru in extremis. Je sais que sans l’interprète et la confiance qu’il a pu établir avec la famille, cette dernière n’aurait pas pu exprimer cette anxiété face à des images de la mer.
Selon moi, un entretien sans interprète n’est pas un entretien de qualité. C’est même un entretien qui n’est pas complètement légitime. J’ai toujours favorisé le recours systématique à l’interprétariat, pour tous les rendez-vous avec des familles allophones, en demandant à chaque fois leur consentement pour faire intervenir un interprète.
Les municipalités sont également actrices de l’action sociale menée au plus près des personnes, à travers notamment les actions de leur centre communal d’action sociale (CCAS). Charlotte, assistante sociale au sein du CCAS de Clermont-Ferrand, partenaire d’ISM Interprétariat, témoigne de ses missions et de l’accompagnement qu’elle assure auprès de personnes allophones :
Quelles sont vos missions au sein du CCAS ?
En qualité d’assistante de service social, mes missions sont d’accueillir et d’accompagner les personnes qui rencontrent des difficultés sociales, économiques, des problématiques de santé, tout en favorisant leur participation aux prises de décisions, dans l’objectif de les rendre actrices de leur accompagnement.
Il s’agit d’un accompagnement global basé sur la libre adhésion, visant à écouter, conseiller et orienter les personnes auprès des partenaires si nécessaire.
Aviez-vous des préjugés et/ou des craintes avant de mettre en place un recours à des interprètes professionnels dans l’accompagnement que vous menez auprès de personnes migrantes allophones ?
Cela m’a effectivement questionné. Dans le cadre de la relation d’aide, les personnes sont amenées à se livrer sur des événements personnels parfois traumatiques et ajouter un intermédiaire interroge sur la notion de relation de confiance.
C’est pourquoi il est important que l’interprète soit partie prenante de l’entretien. Il s’agit pour le travailleur social d’instaurer un climat de coopération, permettant de faire de l’interprète un acteur de l’accompagnement.
Selon vous, quels sont les apports d’un interprète professionnel dans l’accompagnement social des personnes migrantes allophones ? D’un côté pour vous en tant que professionnel et d’un autre côté pour les personnes que vous accompagnez ?
En tant que professionnel, l’intérêt d’avoir recours à un interprète dans le cadre d’un accompagnement social est de m’assurer que mon discours soit transcrit au plus juste et compris par la personne accompagnée. En effet, dans le cadre de l’accès aux droits, cela favorise la transmission d’informations très techniques. L’interprète fluidifie les échanges. La personne se sent alors libre de poser des questions. Elle se sent entendue et comprise. En outre, l’interprète permet une meilleure compréhension de la culture de l’autre et par conséquent peut lever les éventuelles barrières liées aux différences culturelles.
Comment se déroule concrètement l’intervention d’un interprète professionnel dans un rendez-vous ? Pour quel(s) profil(s) de personnes allophones et pour quel(s) type(s) d’accompagnement(s) ?
Tout d’abord, chaque personne se présente : le professionnel, la personne accompagnée et l’interprète. Le professionnel présente ses missions et son cadre d’intervention. Ensuite, le professionnel présente le thème de l’entretien et les échanges peuvent commencer.
Les personnes allophones que nous accompagnons sont principalement originaires d’Afghanistan, du Bangladesh, d’Afrique non-francophone, et elles sont reçues pour des problématiques liées à l’accès aux droits, le logement, la santé, l’insertion professionnelle ou encore des difficultés financières.
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