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Observatoire – Retour sur le module #5 du Programme 3D : « Les nouvelles voies et les acteurs de l’intégration »

Après avoir exploré différentes étapes du parcours d’exil en France : l’accueil, la demande d’asile, les situations de privation de liberté, tout cela à travers le prisme des enjeux linguistiques et de l’accès aux droits, notre cinquième et dernier séminaire du cycle 2022-2023 a abordé l’intégration sous diverses approches, avec les chercheurs et chercheuses, les associations, les acteurs institutionnels qui s’investissent dans ce processus. Intitulé « Les nouvelles voies et les acteurs de l’intégration », ce séminaire s’est tenu les 23 et 24 mars 2023 et a rassemblé une soixantaine de personnes issues du milieu de l’interprétariat et la traduction, du milieu associatif, ainsi que des acteurs publics agissant dans le domaine de l’intégration des personnes exilées.
Les interventions
La première journée d’échanges a été consacrée à une approche socio-historique sur la façon d’appréhender les populations étrangères en France, sur les notions labiles d’intégration, d’assimilation, de diversité, dont les définitions se recomposent au gré des conjonctures politiques.
El Yamine Soum, consultant et chargé d’enseignement, a débuté l’après-midi en retraçant les discours sur les personnes étrangères et les politiques de contrôle de leur entrée et leur séjour en France depuis le XIXème siècle. Il a fait remarquer l’évolution dans la construction de « l’autre » migrant : tantôt à travers le prisme de la menace, tantôt à travers celle du besoin et la progressive mise à l’agenda de la question de la diversité. Entre discours négatifs et positifs, nous retrouvons les récurrences réguler, trier, expulser, et surtout l’instrumentalisation des migrations.
Samia Messaoudi, journaliste et autrice, a poursuivi l’après-midi en abordant le processus d’intégration à travers le sentiment d’appartenance et les identités plurielles des personnes immigrées. Elle a rappelé que l’Histoire de l’immigration est composée d’histoires individuelles, de vécus singuliers et que le rapport à l’appartenance est également informé par cette construction de l’autre, par les discours produits sur soi, sur son pays d’origine, par les discriminations subies. Elle a insisté sur le besoin de faire connaître les histoires de l’immigration, d’interpeller le pays sur la diversité des histoires qui le composent.
La deuxième journée a commencé par une intervention de Sophie Bilong, chercheuse associée à l’Institut Français des Relations Internationales, sur l’importance de la participation des personnes exilées aux programmes et politiques qui les concernent. Elle remarque les multiples intérêts de la participation : pour prendre en compte le savoir expérientiel des personnes exilées, pour analyser l’efficacité des actions menées, pour entamer un parcours de citoyenneté. S’il existe plusieurs niveaux de participation au niveau associatif, au niveau politique on ne trouve pas d’instance de participation nationale et les auditions dans le cadre de projets de loi se font au bon vouloir des parlementaires.
Augustin Rogy, Conseiller emploi, innovation et ressources à la Délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés (Diair) a poursuivi les échanges en expliquant l’approche transversale et expérimentale et le rôle d’intermédiaire de la Diair auprès de différents acteurs ministériels, de collectivités territoriales, d’associations et des citoyens et citoyennes. Il a mentionné certains projets portés : notamment l’Académie, où la participation des personnes réfugiées est l’identité même du projet.
La journée s’est poursuivie avec trois interventions sur l’intégration linguistique, culturelle, professionnelle.
Haïfa Hubert, enseignante en langues et géopolitique et Johannes Wetzel, enseignant de langue allemande à l’École supérieure des sciences économiques et commerciales (ESSEC) ont abordé les programmes d’échange linguistique et culturel, les enseignements sur les thématiques migratoires menés au sein de l’ESSEC afin de participer à l’intégration des personnes exilées et sensibiliser les étudiantes et étudiants. Tous deux ont abordé les enjeux et la complexité de tels projets de partage, sachant que l’accès aux études pour les personnes réfugiées est central dans la lutte contre leur déclassement.
Emmanuelle Bourge, responsable pré-incubation et sensibilisation à Singa Paris a abondé dans le sens des observations des autres intervenantes et intervenants en expliquant le nécessaire changement de regard sur les personnes nouvellement arrivées et l’accompagnement à l’entrepreneuriat, qu’il s’agisse de la création d’une entreprise ou d’une association, menés par Singa.
Enfin, nous avons conclu ce module avec Félix Guyon, délégué général de l’école Thot, association qui propose non seulement une formation diplômante en français langue étrangère pour les personnes exilées allophones, mais également un accompagnement global psychothérapeutique, juridique, social, professionnel, qui leur permette de se consacrer véritablement à l’apprentissage de la langue, et de préparer la suite de leur parcours.
Ainsi, nous avons échangé sur les multiples facettes de l’intégration et pu comprendre que si sa définition fait l’objet de nombreuses convoitises politiques, elle ne saurait se réduire à un seul élément : ni la seule participation politique, la seule obtention d’un emploi, le seul apprentissage de la langue, la seule reconnaissance des diplômes étrangers peuvent suffire. D’où l’importance d’une approche plurielle qui prenne en compte les aspects culturels, politiques et linguistiques de la compréhension mutuelle.
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